QUATRIÈME DIMANCHE DE CARÊME

Saint Jean de l’Echelle

Hébr. VI : 13-20 ; Marc IX : 17-31

Eph. V : 9-19 ; Matth. IV :25 - V :12

AU NOM DU PÈRE DU FILS ET DU SAINT-ESPRIT

Bien-aimés Frères et Sœurs

I - L’apôtre, dans un paragraphe précédent poursuivait ses exhortations morales bien adaptées à ce temps pénitentiel : persévérez, ne vous relâchez pas, étant ceux qui, par la foi sont devenus héritiers de la Promesse, et de là il en vient au texte que vous avez entendu, c’est-à-dire à la Promesse de Dieu à Abraham : « Je te bénirai et multiplierai ta postérité … », mais il souligne que Dieu promet cela par serment, un serment sur Lui-même, puisqu’Il n’a pas de supérieur. Nous avons donc, comme Abraham dont nous sommes les héritiers, la Promesse ET le Serment. C’est là, ajoute-t-il, l’ancre – la métaphore est étrange – l’ancre par laquelle notre âme se trouve amarrée, une ancre qui pénètre au-dedans du rideau [le rideau mystique qui sépare le Sanctuaire du Temple où sont les fidèles], là donc où est entré notre « Précurseur », comme dit saint Paul, le CHRIST, grand Prêtre éternel selon l’ordre de Melchisédech.

L’épître nous a fait passer du plan de la morale et de la bonne conduite aux réalités mystiques.

II - La péricope évangélique nous ramène, pourrait-on presque dire au plan de la quotidienneté – du miracle, cependant ! – puisqu’il s’agit de la guérison de l’enfant que notre médecine qualifierait d’épileptique, cet enfant possédé du démon lequel le faisait tomber dans des crises de tétanie et autres, le jetant éventuellement dans le feu ou dans l’eau. Nous nous trouvons au plan de la thaumaturgie. Le Père qui amène son malade au Christ, lui dit qu’il l’a préalablement montré aux apôtres qui n’ont pu le guérir … « Hommes de peu de foi ! » dit le Seigneur. Lui-même guérit l’enfant, ainsi que raconte l’évangile.

Mais le Christ dit au père : « Crois-tu ? ». La foi – dont témoigne aussitôt le malheureux père –, est l’adhésion indispensable de celui qui recourt au Christ.

Cette guérison – qui ne nous surprend pas ! – suscite par contre l’interrogation des apôtres : « Pourquoi, nous, n’avons-nous pu le guérir ? ». Or le Christ leur répond : « Cette race de démons ne peut être vaincue que par le jeûne et la prière ». Le jeûne et la prière, nous y sommes particulièrement adaptés en cette période de Carême, nous en expérimentons chaque jour la dimension morale et spirituelle. Nous progressons par le jeûne et la prière. Mais l’enseignement du Christ notre Dieu nous en fait percevoir ici la dimension MYSTIQUE. Nous connaissons leur dimension humaine et moral, mais le Christ nous fait percevoir leur efficacité AU DELA DU VOILE, dans cet au-delà du voile, où, par le Christ, nous sommes ancrés – comme un navire, selon la métaphore de l’apôtre Paul.

Etant ainsi prédisposés à comprendre, nous comprenons que la péricope évangélique se poursuive par l’annonce de la Passion et de la Résurrection : Celui qui, sous nos yeux a guéri le jeune épileptique, Il est notre grand prêtre éternel selon l’ordre de Melchisédech. Les miracles qu’Il accomplit sont le prélude de cette GUÉRISON éternelle qu’est le Salut, accompli « une fois pour toutes » par notre grand prêtre éternel, le Christ.

III - « Vous étiez dans les ténèbres, mais vous êtes lumière dans Seigneur : Marchez donc comme des enfants de lumière ! » dit l’épître aux Ephésiens qui détaille ensuite tous les fruits de l’esprit, la bonté, la justice, la vérité. C’est pourquoi il était dit : « Réveille-toi, toi qui dors et le Christ t’éclairera ! »

Mais l’évangile qui suit, en l’honneur du guide des moines qu’était saint Jean de l’Echelle, n’est autre que le « grand » évangile des béatitudes, celui que l’on trouve chez saint Matthieu et celui que nous entendons tous les dimanches.

Sagesse surhumaine et divine, inépuisable et au-delà de tout commentaire et qu’on ne peut cesser de contempler et d’adorer !

En l’honneur de ce moine et guide spirituel éminent, en la pensée aussi de tous ceux qui sont dans les ténèbres et la recherche, de ceux qui sont dans l’angoisse et de tous ceux qui, dans notre paroisse, ont des raisons d’inquiétude ou de tristesse, je vais lire à nouveau ce «  sermon des béatitudes » :

Bienheureux les pauvres en esprit, car le royaume des cieux est à eux,

Bienheureux ceux qui pleurent, car ils seront consolés,

Bienheureux les doux car ils hériteront la terre,

Bienheureux ceux qui ont faim et soif de justice car ils seront rassasiés,

Bienheureux les miséricordieux, car ils obtiendront miséricorde,

Bienheureux les cœurs purs, car ils verront Dieu,

Bienheureux les pacificateurs, car ils seront appelés fils de Dieu,

Bienheureux ceux qui sont persécutés pour la justice, car le royaume des cieux est à eux,

Bienheureux serez vous quand à cause de moi, on vous injuriera, on vous persécutera, on dira faussement de vous toute sorte de mal,

Réjouissez-vous alors et soyez dans l’allégresse, parce que votre récompense sera grande dans les cieux, car ainsi ont été persécutés les prophètes qui ont été avant vous.

Par les prières de saint Jean et des saints moines ascètes, puissions-nous nous aussi surmonter nos avanies et nos tristesses et parvenir à la pureté du cœur et à l’Illumination divine !

 

AMIN



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3e DIMANCHE de CARÊME

VÉNÉRATION de la CROIX

 

Liturgie : Hébr. IV,14-V,-6 ; Marc VIII,34-IX,1

 

AU NOM DU PÈRE DU FILS ET DU SAINT ESPRIT !

Bien-aimés Frères et Sœurs,

 

ICe troisième dimanche de Carême est celui de la Croix. Nous avons eu, avec le Triomphe de l’Orthodoxie, la fête des Icônes qui sont le signe visible de la Divinité du Christ. « Dieu, nous L’avons vu », c’est le cri de victoire des orthodoxes. Nous L’avons vu et nous Le voyons dans toutes nos églises, dans toutes nos maisons, présent dans Ses saintes icônes que nous vénérons avec piété, sur lesquelles nous déposons avec ferveur le baiser de nos lèvres.

Le deuxième dimanche de Carême était celui de ce maître de la mystique, Grégoire Palamas, guide de nos âmes par l’hésychasme, lequel, par l’inhabitation en nous du Nom de Jésus, nous conduit à la participation de la Lumière incréée, la Lumière du Thabor.

Dans la continuation de ce cheminement de carême, voici que, en ce troisième dimanche, nous sommes directement face à face avec la Croix, avec le Christ Lui-même qui nous a sauvés et rachetés par Sa Croix.

IIA cette confrontation nous prépare l’Epître aux Hébreux dans la péricope d’aujourd’hui, tout entière consacrée au Sacerdoce de Jésus-Christ, sacerdoce souverain et éternel. Nous avons en Christ, le souverain Sacrificateur, Celui qui peut offrir le Don pour le peuple – puisqu'Il connaît par Son Humanité notre humanité qu’Il élève vers Dieu. Ces offrandes, il est dit, ailleurs, qu’Il les a accomplies une fois pour toutes, puisque Il s’est offert Lui-même par la Croix.

Or, cette médiation, poursuit l’Apôtre, personne ne peut s’en investir soi-même, l’assumer soi-même. Aussi le Christ ne s’est-Il pas attribué la gloire d’être souverain sacrificateur, Il l’a reçue de Celui qui a dit : « Tu es Mon Fils : aujourd’hui [C’est-à-dire : éternellement] Je T’ai engendré. Mais le Même Lui a dit aussi : « Tu es prêtre pour l’éternité selon l’ordre de Melchisédech –  « L’ordre de Melchisédech »  correspondant au Nouveau Sacerdoce, celui de la Foi, alors que le sacerdoce ancien, celui d’Aaron et des lévites, était celui de la Loi. Or le Christ était de la tribu de Juda (dans laquelle, jusqu’alors, ainsi que le rappelle un peu plus loin l’apôtre Paul, il n’y avait pas eu de sacerdoce).

IIILa révélation plénière, en ce jour et pour toute la suite, se trouve dans la péricope évangélique de Marc.

C’est une révélation traumatisante pour chacun de nous :

« Quiconque veut venir à Moi, qu’il renonce à soi-même, qu’il se charge de sa croix et qu’il me suive ! »

« Qu’il se charge de sa croix », cela a été dit avant la crucifixion, ce qui montre, à la fois que cette crucifixion était volontaire et également que cette exhortation ne s’applique pas à un acte unique du fidèle, mais à toute sa vie.

En effet, le Christ précise : « quiconque voudra sauver sa vie la perdra, mais quiconque perdra sa vie pour l’amour de Moi et de l’évangile la sauvera ».

« Vouloir sauver sa vie » qu’est-ce à dire ? C'est-à-dire : vouloir pour soi tous les biens désirables de ce monde, une situation sociale toujours meilleure, toujours plus d’argent, et par suite, tous les biens que l’on désire et dont on veut jouir ?

Or le Christ ajoute : « Que servirait-il de gagner le monde [donc tous les biens que j’ai dit] et de perdre son âme ? »

Il explicite également ce que signifie cette course après les biens humains : « Quiconque aura eu honte de Moi et de Mes parolesl’appât du gain et des jouissances, vous le comprenez, bien-aimés Frères et Sœurs, est en effet une répudiation du Christ – quiconque aura eu honte de Moi et de Mes paroles, le Fils de l’Homme le répudiera aussi quand Il viendra avec ses anges ! »

L’option de la croix n’est pas facultative : elle est la condition même du Salut !

Pensons-y avec gravité, frères et sœurs bien-aimés !

Mais la contrepartie est à portée de la main : certains ne mourront point sans avoir vu le règne de Dieu venir avec puissance ! Cela ne s’applique pas seulement aux témoins historiques de la Transfiguration, mais à tous ceux qui, suivant la voie de saint Grégoire Palamas, verront luire sur eux la Lumière Incréée.

Que, par Sa Croix, le Christ notre Dieu nous accorde aussi cette Illumination plénière.

AMIN


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1er DIMANCHE de CARÊME : TRIOMPHE de l’ORTHODOXIE

Hébr. XI, 24-26,32- XII, 2

Jean I, 43-51

 

AU NOM DU PÈRE DU FILS ET DU SAINT ESPRIT

Bien-aimés Frères et Sœurs

 

IDimanche dernier, nous étions dans la tristesse de l’accablement d’Adam chassé du Paradis. Effectivement, dès les vêpres du Pardon, nous sommes passés aux ornements noirs et nous avons commencé le Grand Jeûne. Mais Dieu ne nous laisse pas longtemps dans le désarroi : aujourd’hui Premier Dimanche de Carême, très régulièrement, nous fêtons cette grande fête de consolation qu’est le Triomphe de l’Orthodoxie.

L’iconoclasme, déclenché par deux décrets de l’empereur de Constantinople Léon III (726 et 728) a duré cent vingt ans – avec des hauts et des bas - et cela a été pour nos frères orthodoxes qui vivaient alors une persécution épouvantable. On détruisait les icônes dont on vidait les églises, on persécutait tous ceux qui les vénéraient. Quiconque avait une croix sur lui risquait la mort.

Il y a eu une brève accalmie sous le règne de l’impératrice Irène qui régnait aux alentours de 800. Le septième concile s’était pourtant prononcé en faveur des icônes. Le fanatisme destructeur, influencé probablement par le comportement des musulmans et des juifs, a repris … Mais, à la mort de Théodule, redoutable iconoclaste (842), c’est sa femme Théodora qui a assumé la régence, et Théodora a rétabli avec autorité la vénération des icônes. L’iconoclasme était terminé, et, en cette fête, l’Église rend hommage plusieurs fois dans les offices de la veille « aux saint empereurs, Michel et Théodora » - Théodora était régente et Michel III, comme on le voit sur l’icône du jour, était encore un enfant.

IILes icônes sont fondamentales pour nous, vous le savez ; aux iconoclastes de tout bord qui disaient : « nul n’a jamais vu Dieu », les orthodoxes répondaient : « Mais nous, nous L’avons vu ! ». L’icône est l’affirmation de la Divinité du Christ. C’est pourquoi nous représentons le Christ et les saints qui sont tous l’image du Christ, et la Mère de Dieu a sa place rituelle dans toutes nos églises.

Dans le passage d’aujourd’hui de l’épître aux Hébreux, après avoir rendu un hommage appuyé à Moïse qui « devenu grand » refusa d’être appelé fils de la fille de Pharaon, pour rejoindre ses frères, renonçant ainsi aux gloires passagères, l’apôtre Paul évoque ensuite, à partir de Gédéon, tous ces autres grands Hébreux dont les œuvres furent exceptionnelles par la foi – c’est le leitmotiv de ces évocations : ils ont vaincu les ennemis, conquis des royaumes, ils ont ressuscité des morts. Leur courage dans les épreuves, volontaires ou infligées n’est pas moins remarquable : on les a tués, sciés, lapidés. Ils vivaient dans des cavernes ou des trous de la terre, vêtus de peaux de bêtes, eux dont le monde était indigne.

Cependant, poursuit l’apôtre, ils n’ont pas reçu la récompense espérée et promise !

Est-ce un surprenant paradoxe, pourrions-nous demander …

Non, poursuit l’apôtre : Dieu ne voulait pas – pour accroître la plénitude de la récompense – qu’ils parviennent sans nous à l’aboutissement.

Mais nous, avec de tels témoins – dont la valeur n’est pas méconnue ! – prenons le Christ pour guide et pour modèle, le Christ qui a choisi la Croix et subi l’humiliation, mais qui siège à la droite de Dieu.

IIICette gloire impérissable qui entourait le Christ, même en cette vie, nous en avons une idée et un reflet saisissants dans l’épisode de Nathanaël. Jésus venait de choisir Philippe, comme Il le faisait généralement en lui disant simplement : « Suis-moi ! ». Adhésion immédiate et totale de Philippe ! Celui-ci rencontre, peu après, Nathanaël et il lui : « Celui dont Moïse et les prophètes ont parlé, nous l’avons trouvé : c’est Jésus, le fils de Joseph de Nazareth ». Nathanaël n’attendait rien de bon de Nazareth, mais il suit Philippe. Jésus, le voyant arriver dit : « Voici un vrai Israélite en qui il n’y a point de fraude ». « Comment me connais-tu ? », demande Nathanaël stupéfait. Jésus répond : « Avant que Philippe t’appelle, quand tu étais sous le figuier je t’ai vu ! » Nathanël, bouleversé par cette « double vue » de Jésus, Le reconnaît aussitôt comme Fils de Dieu et roi d’israël. Mais le Christ annonce d’avantage : vous verrez le ciel ouvert et les anges monter et descendre sur le Fils de l’homme.

Vision mystique ! qui fut celle des apôtres ou du précurseur – pensons notamment au Baptême, à la Transfiguration , à l’Ensevelissement, à tous ceux, en général, que le Christ choisit …

Voir « au-delà des apparences » n’est-ce pas à cela que nous convient nos saintes icônes que nous fêtons aujourd’hui ? VÉNÉRONS-LES !

 

AMIN

 



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DIMANCHE de l’EXPULSION d’ADAM

Matines : Jean XX, 11-18

Liturgie : Rom. XIII, 11 – XIV, 4 ; Matt. VI, 14-21


AU NOM DU PERE DU FILS ET DU SAINT ESPRIT

Bien-aimés Frères et Sœurs

 

Ce dimanche est aussi celui de la Tyrophagie, c’est-à-dire, ce soir même, la fin des Laitages, et le commencement du Grand Carême, temps de Pénitence absolue, conduisant à la PÂQUE du Christ souffrant et Rédempteur.

1 – Ces quarante jours rappellent immédiatement les quarante jours de Lamentations et de désespoir d’Adam et d’Eve au pied des murs du Paradis Terrestre dont ils venaient d’être chassés pour leur désobéissance. Après le péché, raconte la Genèse, Adam et Eve entendirent la « Voix » de Dieu – qui ne leur avait pas encore parlé ! Mais Dieu est Parole qui se promenait au Paradis terrestre, par ce beau jour ensoleillé. Ils se cachèrent car ils étaient nus et, maintenant, ils le savaient ! Et Dieu – le Christ, qui se promenait, et qui, en tant qu’homme ne sait pas tout –, les appelle : « Adam, Adam ! Où es-tu ? »

« … Je t’ai entendu marcher dans le Paradis et j’ai eu peur, parce que je suis nu ! ». Ainsi Adam confessait-il sa faute. Il fut chassé du Paradis, et pendant quarante jours, il se lamenta autour des murs du Paradis.

Nous avons eu, dès avant le début du Grand Carême, le chant du Psaume 136 « Près des fleuves de Babylone assis, nous pleurions en nous souvenant de Sion … » autre chant d’exil et de douleur.

Mais fondamentale s’avère la notion de PARDON, qui, peu avant la péricope de ce jour consacrée à la prière, figure évidemment dans le « Notre Père » enseigné en ce jour par le Christ à Ses apôtres, mais est en outre soulignée par ce commentaire du Seigneur Lui-même : « Si vous ne pardonnez pas aux hommes, votre Père ne vous pardonnera pas non plus ».

Ce dimanche, en effet, est celui du Pardon !

2 – Réveillez-vous du sommeil ! Le temps presse, dit l’apôtre Paul, le Salut est plus près de nous que quand nous nous sommes convertis – puisqu’il s’agit, en effet, en ce dimanche, de la proximité de la Pâque. Rejetons les œuvres de ténèbres !

L’épître poursuit : « Ne nous jugeons pas les uns les autres ». Certains jeûnent beaucoup, d’autres jeûnent moins. Nous n’avons pas le pouvoir de juger.

3 - Il y a des jeûnes ostentatoires : ils ont en eux-mêmes leur récompense, dit quant à lui l’apôtre Matthieu.

Le vrai jeûne est pour Dieu Seul : on jeûne dans le secret et Dieu nous voit.

Il convient en effet d’être détaché des biens et des valeurs de ce monde – où il y a, nous la savons, des parasites et des voleurs : les vrais trésors sont ceux que l’on amasse dans le Ciel.

Notre modèle absolu du détachement et de l’ascèse est évidemment le CHRIST en sa Passion volontaire.

Mais, dans cet évangile même, le thème de l’ascèse n’est en aucune manière disjoint de celui du pardon : « Si vous pardonnez aux hommes leurs offenses, votre Père céleste vous pardonnera aussi les vôtres. Si vous ne pardonnez pas aux hommes, votre Père ne vous pardonnera pas non plus les vôtres ».

Si bien que ce dimanche qui précède immédiatement le Grand Carême est aussi celui du Pardon. Le dimanche précédent qui était celui du Jugement, vous avez observé que le Christ dans la prosopopée de son discours aux élus et aux damnés, ne parle nullement des devoirs envers Dieu, mais uniquement de la charité – ou du manque de charité – envers le prochain. Il va sans dire que nous nous engageons aujourd’hui dans le Carême par amour pour Dieu, et donc par loyauté envers Ses commandements. Mais nul ne peut aimer Dieu s’il n’aime pas son prochain : le premier et le « second » commandement sont liés et ils sont semblables. C’est donc de grand cœur que tout à l’heure nous nous pardonnerons les uns les autres.

Allons au Christ Sauveur en nous unissant à Lui par la souffrance, celle en particulier que comporte la privation de nourritures et de toutes les autres jouissances mondaines.

Lui qui est Dieu !

Mais allons aussi à Lui par l’amour pour nos frères.

Dans le Carême, nous nous acheminons, par la souffrance, vers la Pâque. Mais, en liaison avec la préoccupation constante du prochain, cet autre thème est présent  dans les textes de ce jour : Ne jugeons pas ! …

En effet, le seul Juge est Dieu.

Juge terrible, en vérité (Le Dimanche du Jugement est tout proche !)

- Pensons au long exil de la descendance d’Adam,

- Pensons au long exil de Babylone,

- Pensons à la fin redoutable du Psaume « Près des fleuves de Babylone » :: « Fille de Babylone … Heureux qui saisira tes enfants, et les brisera contre le rocher ».

Dieu, certes, est le Juge Terrible,

Mais Il est aussi notre Sauveur et notre Rédempteur.

 

AMIN




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DIMANCHE du JUGEMENT

 

 

Matines : Jean XX, 1-10

Liturgie : 1 Cor. VIII, 8 - IX, 2 ; Matt. XXV, 31-46

 

AU NOM DU PÈRE DU FILS ET DU SAINT ESPRIT !

Bien aimés Frères et Sœurs !

 

I - Ce dimanche qui est celui du Jugement, est également le dimanche de « Carnaval » - ce qui veut dire : « adieu, la viande ! » - et marque l’accès dans le jeûne, relativement limité, de la « Semaine des Laitages ».

Ceci nous explique immédiatement le thème de l’épître aux Corinthiens qui vient d’être lue. L’apôtre parle du jeûne, d’une certaine manière quant au fond : la nourriture ne nous rapproche, ni ne nous éloigne de Dieu : si nous mangeons, nous n’aurons rien de plus, et si nous ne mangeons pas, rien de moins. Cela remet les choses au point : le jeûne n’est pas un concours d’athlétisme, on ne regarde pas qui jeûne plus ou moins.

Mais attention : il peut arriver qu’un croyant pieux soit amené un jour – par telle circonstance momentanée – à ne pas jeûner ... Mais si un fidèle moins averti, le voit ne pas jeûner en un lieu public (comme étaient les temples païens) et s’il est scandalisé, alors il faut s’abstenir de ce repas afin de ne pas scandaliser ce fidèle innocent pour lequel Christ est mort ! Plutôt que de scandaliser un frère, conclut l’apôtre, j’aime mieux ne plus jamais manger de viande.

L’abstention de certaines nourritures reste également dans le Carême une règle de spiritualité : il s’agit, pour nous, de nous priver des nourritures carnées – qui sont des excitants et qui, comme telles, contrarient la prière.

IILe Carême est une période bénie d’affinement dans notre acheminement annuel et perpétuel, vers le Seigneur, Pâques d’abord qui est la fête de notre Salut, et ensuite le Jour Terrible du Jugement, celui qui nous attend au-delà de notre vie. Dans la péricope d’aujourd’hui, le Christ évoque Son retour, avec tous les anges, lorsqu’Il viendra pour juger tous les hommes. Le monde actuel, fondamentalement païen, n’y pense pas, mais il y aura ce Jugement final certains seront condamnés, tandis que d’autres seront sauvés.

« Tous les hommes seront sauvés ! » disent aujourd’hui les sots, les jouisseurs, certains « intellos », voire certaines pseudo églises. Du tout ! Le Christ notre Dieu dit explicitement le contraire ! Au jour terrible, Il séparera Lui-même les brebis d’avec les boucs, les bons qui donnent du fruit et les mauvais qui n’en donnent pas !

Le critère de discernement du Juge est explicité. Aux brebis Il dira : « Venez les bénis de mon Père au Royaume préparé pour vous dès le commencement du monde » car, poursuit-Il, « j’ai eu faim et vous m’avez nourri, j’ai eu soif et vous m’avez donné à boire, j’étais nu et vous m’avez vêtu, malade et vous m’avez soigné, prisonnier et vous m’avez visité »… Mais ces bons répondront avec stupeur : « quand t’avons-nous trouvé affamé et t’avons-nous nourri ? Quand, assoiffé et t’avons-nous désaltéré »… et ainsi de suite pour tous les autres secours évoqués. Ils sont ébahis, mais le Christ leur répond : « Quand vous l’avez fait au plus petit d’entre mes frères, c’est à Moi que vous l’avez fait ».

« Au plus petit D’ENTRE MES FRÈRES … » : C’est généreux, sans aucun doute, d’envoyer de l’argent à Haïti ou ailleurs. Mais les frères du Christ c’est ceux qui se rattachent à Lui, ecclésiastiques et fidèles, et qui, par suite, reçoivent et donnent A CAUSE DE LUI.

Comme nous le savons, et comme je le rappelais plus haut, le jeûne est un moyen privilégié d’affinement et d’approfondissement spirituel. Mais, comme il est dit ailleurs dans les évangiles, il ne s’agit pas de s’isoler dans son propre ascétisme, de prendre la mine contrite et de se replier sur soi : ayez au contraire un comportement bienveillant et souriant comme si vous ne jeûniez pas : pratiquons le jeûne, mais n’oublions pas le prochain – c’est-à-dire les plus proches, au sens étymologique du terme. Le jeûne ne doit pas se disjoindre de la charité.

Ainsi armés par ces commandements salutaires, acheminons-nous fraternellement vers un SAINT CARÊME !

 

AMIN

 


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