Enfin une tentative sérieuse de réunion de l'EORHF

 

Il convient de féliciter chaleureusement le Métropolite Agafangel d'avoir pris la peine d'exposer à ce sujet des idées profondes et intéressantes qui se détachent agréablement sur le fond maussade de notre quotidien. En effet, qui aujourd'hui réfléchit ou, ne serait-ce, comprend l'intérêt qu'il y a de réfléchir ? Et pourtant quelle richesse a pu représenter l’Église Hors-Frontières dans ce domaine! Quel capital spirituel et intellectuel elle a amassé durant le siècle écoulé. Notre misérable situation actuelle devrait tout spécialement nous inciter tous à sortir de cette situation, devrait nous amener à proposer des idées, des solutions, en un mot – devrait nous inciter à agir et à ne pas nous enfermer orgueilleusement dans une position prétendument juste et pure. Car sans l'ombre d'un doute, nous savons qu'il y a autour de nous, mais malheureusement pas encore avec nous pour l'instant, un très grand nombre de personnes qui partagent nos positions et sont indubitablement nos frères. Le temps n'est-il pas venu de se pencher sérieusement sur ce problème ? En effet, que voyons-nous : un prêtre âgé vient à mourir et avec lui s'éteint la paroisse. Qu'advient-il alors de notre mission, de notre témoignage de l’Église Hors-Frontières traditionnelle ? Pour quoi avons-nous lutté il y a une quinzaine d'années ? Était-ce pour achever ce combat de façon aussi peu glorieuse et inutile ?

C'est pourquoi nous devons tous accueillir avec gratitude et sans arrière-pensées ces réflexions de Mgr Agafangel. Il est difficilement compréhensible et triste de constater que cet article n'a suscité aucun écho, aucun commentaire. C'est franchement décourageant. L’Église est un organisme vivant dans lequel la vie, et non l'apathie, devrait régner. Il faut qu'entre les fidèles s'établissent des échanges d'opinion, même des disputes, mais qu'il y ait de la vie, de l'espoir, une réflexion partagée. On peut contester certaines affirmations, mais il faut se réjouir que pour la première fois, comme il nous semble, est entreprise une tentative sérieuse d'aller vers l'autre, de tendre une main fraternelle, d'oublier les offenses, les disputes anciennes. Jusqu'à présent, nous avons souvent entendu des déclarations, mais le but réel en était de montrer que l'on faisait tout pour l'union, mais que malheureusement les parties adverses ne voulaient rien entendre. Ici, pour la première fois est fait ce pas sérieux et sincère dans le sens de l'uniondes différentes structures issues de l'EORHF que tant de fidèles attendaient depuis longtemps.

Après ces phrases d'approbation, positives, passons à ce que nous avions dit plus haut : dans les questions religieuses, il peut y avoir des dissensions, des désaccords, des points de vue différents, toutefois il faut toujours se garder de vouloir imposer à tout prix son point de vue, mais toujours rechercher ce qui peut être utile pour l’Église.

Dans son article « ''Éclats'', schismes et perspectives d'union » Mgr le Métropolite présente beaucoup d'idées intéressantes sur l'unité et l'unicité de l’Église, des idées développées par de nombreux Saints Pères dans leurs écrits, en particulier par saint Cyprien de Carthage. Dans l’Église Hors-Frontières ce thème a été brillamment exposé par le regretté Évêque Georges /Grabbe/. En ce qui me concerne, je peux dire que j'en ai été fortement influencé dans mon édification religieuse et elles ont laissé en moi une empreinte indélébile. Néanmoins, appliquer ces réflexions élevées, qui se rapportent à l’Église-Corps du Christ, à nos malheureux désaccords internes, est tout à fait abusif. Qu'on le veuille ou non, l’Église et l’Église Hors-Frontières sont deux entités différentes. En tant que membres de l’Église Hors-Frontières nous sommes naturellement de plein droit membres de l’Église. Pour nous l’Église Hors-Frontières est indubitablement l’Église, mais l’Église est néanmoins plus grande que l’Église Hors-Frontières. C'est pourquoi accuser ceux qui se proposent de rassembler les ''éclats'' issus de l'EORHF de professer la théorie oecuméniste des branches, et dire qu'ils seraient atteints de l'hérésie néfaste de l’œcuménisme, n'est tout simplement pas sérieux. Il est temps de comprendre ce que disent ces gens : ce n'est pas l’Église qui se serait divisée en ''éclats'', mais l’Église Hors-Frontières. Et c'est pourquoi nous constatons avec une énorme satisfaction que c'est précisément ce qui ressort du récent Appel synodal, proposant d'établir la communion eucharistique entre toutes les parties issues de l'EORHF historique et qui ne se sont pas unies au Patriarcat de Moscou.

Malheureusement, tout en constatant avec plaisir cette sage décision, nous voyons que ne sont pas encore guéries les blessures nées des malheureux désaccords récents et l'on continue d'agonir les Archevêques Andronik et Sophrony de toutes sortes d'épithètes les plus désagréables. On dit notamment que dans leur démarche de séparation il n'y avait pas de raisons canoniques. Nous n'allons pas entrer dans l'analyse pour savoir si les raisons étaient ou non canoniques. Il suffit de dire qu'il y avait des raisons. C'est là un fait que personne ne peut discuter. Et ces raisons n'ont jamais été sérieusement entendues, ce qui a engendré cette hostilité toujours aussi vive.

C'est pourquoi nous nous adressons aux deux parties : mettez un terme, une fois pour toutes, à toutes vos récriminations mutuelles, cessez de verser de l'huile sur le feu, arrêtez cette activité destructrice dont nous sommes ces dernières années les témoins involontaires.

Peut-on rester crédible en tendant la main à tous ceux qui sont sortis de l’EORHF historique et qui ont refusé de se soumettre au PdM, tout en considérant Mgrs Andronik et Sophrony étrangers à l’Église Hors-Frontières, presque comme s'ils étaient ses ennemis ? Il est dit que tout le monde doit être responsable de l'avenir de notre Église, que nous avons besoin de monastères, de réunions et de programmes spécifiques pour notre jeunesse, que ce sont là des questions dont dépend notre survie. Nous avons déjà un monastère exemplaire de moniales à Egorovka près d'Odessa dirigé par la remarquable Mère Higoumène Alexandra, nous avons un monastère d'homme florissant en Moldavie chez Mgr Anthime. Le monastère de Mgr Sophrony, dans la région de Pskov, nous serait-il inutile et de trop ? Est-ce que les réunions et camps de jeunes régulièrement organisés à Mountain View sous l'omophore de Mgr Andronik ne répondent pas aux besoins nécessaires pour assurer l'avenir de notre Église ? Quel profit peut procurer à notre Église renaissante l'attitude à l'égard du responsable de notre paroisse particulièrement fournie de Melbourne, Mgr André /Erastov/, qui a derrière lui vingt ans de monachisme à Jordanville, qui est le représentant sans doute le plus éminent de l'école iconographique de Jordanville, qui est un pédagogue reconnu ? Aurions-nous vraiment un trop plein de membres de ce calibre pour pouvoir sans regret nous en passer ? Nous comprenons que la question de sa consécration épiscopale puisse poser un problème, mais ne serait-il pas plus sage d'évoquer dans ce cas la possibilité d'appliquer une chirotesie, comme cela a pu être le cas dans d'autres occasions, plutôt que d'évoquer une brutale réduction à l'état laïque ? En ce qui nous concerne, et sans la moindre réserve, ils sont tous nos frères Hors-Frontières en Christ, avec lesquels nous nous considérons être en pleine unité et union. Assurément, il est plus que louable de se préoccuper d'établir des dialogues et des bonnes relations avec ceux qui nous sont proches, mais pour être réellement crédible il faut en tout premier lieu se soucier de rassembler sa propre famille.

Mais combien il est joyeux et enthousiasmant de lire – ce que nous avons plus d'une fois écrit – que dans la question tragique de l'éclatement de l’Église Hors-Frontières et de son émiettement en ''éclats'', il a pu y avoir, aussi bizarre que cela puisse paraître, plusieurs vérités et que, ainsi qu'il est dit dans le Message synodal, « Il est évident qu'il n'est pas aujourd’hui utile pour l'EORHF de recommencer à se faire des reproches mutuels sur ce qu'il s'est passé à cette époque ». Oui, chacun pouvait avoir ''sa'' vérité, et ces vérités multiples pouvaient même entrer en conflit entre elles. Personnellement, nous restons totalement fidèle à notre vérité de l'époque, mais c'est une question qui n'est absolument pas d'actualité aujourd'hui. L'essentiel est que ces vérités qui, naguère, ont emprunté des chemins différents, se soient aujourd'hui réunies dans la défense de l’Église Hors-Frontières historique qui nous réunit tous autour d'elle.

Oui, il est heureux de lire des vérités d'apparence aussi simple que sur les territoires, tant de l'ex-URSS que du reste du monde, il y a des structures religieuses ayant conservé une Orthodoxie saine avec lesquelles il est indispensable d'établir des dialogues grâce auxquels « deviendront possibles des concessions réciproques permettant l'unité en Christ. C'est là, la seule voie juste. Le refus d'un tel dialogue est le signe manifeste d'une dégradation spirituelle et le fait que l'on a versé dans le sectarisme ».

Ces pensées de Mgr le Métropolite, qui font naître la joie et l'espoir, ont trouvé leur concrétisation officielle dans le récent Appel synodal, dont nous citons ici avec gratitude la conclusion :

« En raison de la situation critique que nous connaissons, nous proposons d'établir une communion eucharistique entre tous ceux qui étaient membres de l'EORHF d'avant la division, et de n'avoir en commun que le Concile des Évêques, tout en maintenant une autonomie administrative totale de ceux qui accepteront de faire ce pas ».

Après tant de désillusions et pratiquement la perte de tout espoir chez la majorité des fidèles Hors-Frontières d'arriver à être entendus, cet Appel revêt pour nous un caractère pratiquement prophétique. Dieu veuille !

Pour notre part nous mettrons à profit toutes les occasions permettant de réaliser et mettre en pratique cette sage décision de nos Évêques.

 

Protodiacre Germain Ivanoff-Trinadtzaty

 

- - - - - -

 

 APPEL

du Synode des Évêques de l'EORHF à tous ceux qui étaient précédemment

dans l’Église Russe Hors-Frontières non divisée

 

Chers Évêques, prêtres, moines et fidèles !

Nous nous souvenons tous avec gratitude des années vécues dans l’Église Hors-Frontières non divisée jusqu'à ce qu'une majorité signe l'union avec le Patriarcat apostatique et hérétique de Moscou. Le morcellement de l’Église qui s'en suivit, ainsi que la tentative de son anéantissement total par le biais de cette fusion préparée de longue date avec cette ''Église soviétique'' contrôlée par des forces hostiles au Christ, furent une terrible tragédie pour nous tous.

Chaque membre de l’Église, de l’Évêque au simple fidèle, est responsable de son intégrité et de sa pureté. Nous ne pouvons pas ne pas penser et ne pas prier pour le rétablissement de l'unité perdue de l’Église Russe Hors-Frontières.

Il est évident qu'il n'est d'aucune utilité aujourd'hui pour l'EORHF de recommencer à se faire des reproches mutuels sur ce qu'il s'est passé à cette époque. Dans ce domaine chacun a sa vérité. La nôtre est que notre Président a été témoin du fait que le Métropolite Vitaly avait signé sa demande au Concile de se retirer de sa fonction, avait personnellement félicité le nouveau Protohiérarque pour son élection et avait dit que dorénavant il serait Métropolite en retraite. C'est ce dont il a été personnellement témoin.

Nous comprenons parfaitement que d'autres puissent avoir une autre vérité et nous n'avons nullement l'intention de la mettre en doute.

Maintenant nous devons penser à l'avenir proche de notre Église pour lequel nous sommes tous responsables. Nous avons plus d'une fois pu constater que lorsqu'un prêtre venait à mourir, avec lui mourrait sa paroisse. Nous avons plusieurs exemples de paroisses qui sont ainsi mortes. Nous sommes certains que ce problème n'est pas étranger aux autres structures ecclésiales. Nous sommes très peu nombreux, nous avons un besoin vital de monastères, d'établissements de formation du clergé, de programmes pour la jeunesse afin que le souci spirituel de notre troupeau ne cesse pas, car nous en sommes responsables devant Dieu.

En raison de la situation critique que nous connaissons, nous proposons d'établir une communion eucharistique entre tous ceux qui étaient membres de l'EORHF d'avant la division, et de n'avoir en commun que le Concile des Évêques, tout en maintenant une autonomie administrative totale de ceux qui accepteront de faire ce pas.

Si des pourparlers préalables sont nécessaires, nous sommes prêts à les engager.

Président du Synode :

+ Métropolite AGAFANGEL

Membres du Synode :

+ Archevêque GEORGES, + Évêque GREGOIRE, + Évêque NIKON, + Évêque JEAN + Évêque ANTHIME

 

Odessa 16/29 mai 2019