La vénération de la Croix
Chaque année, le troisième dimanche du Grand-Carême nous lisons l'évangile selon saint Marc dans lequel notre Seigneur nous dit que celui qui veut Le suivre, doit renoncer à lui-même, prendre sa croix et marcher à sa suite.
Nous savons que tous les nombreux sages de ce monde, qui proposent chacun leur recette du bonheur pour les hommes, présentent un avenir radieux promettant toute sorte de biens, alors qu'en réalité ce qu'ils proposent s'apparente plus à l'antichambre de l'enfer.
Mais notre Seigneur Jésus-Christ berçait-Il Ses disciples avec de telles promesses roses ? Nullement. Nous savons qu'Il leur disait : « Vous serez haïs de tous, à cause de mon nom; mais celui qui persévérera jusqu'à la fin sera sauvé ».
Certainement qu'à l'époque, avant la crucifixion du Christ, on n'avait pas une idée aussi claire qu'aujourd'hui de ce qu'était la croix et de ce qui signifiait porter sa croix, mais il était clair pour tous qu'il s'agissait d'un instrument d'une mort terrible et honteuse et qu'il s'agissait donc d'accepter une vie de souffrance.
De qui dit-on dans le monde d'aujourd'hui que c'est un homme prospère et heureux ? Habituellement d'un homme riche, possédant de grands moyens car ainsi tout lui est accessible. C'est ainsi qu'en effet pense le monde, mais notre Seigneur Jésus-Christ enseignait : « Et que servirait-il à un homme de gagner tout le monde, s'il perdait son âme? ». Souvenez-vous de la parabole de l'homme qui avait engrangé une riche récolte et qui disait à son âme : « Tu as beaucoup de biens en réserve pour plusieurs années; repose-toi, mange, bois, et réjouis-toi ». Et là Dieu lui dit : « Insensé ! cette nuit même ton âme te sera redemandée; et ce que tu as préparé, pour qui cela sera-t-il ? ». De même dans l'évangile de ce jour, le Seigneur dit : « Et que sert-il à un homme de gagner tout le monde, s'il perd son âme ? ». Pour Celui qui a créé l'âme humaine, celle-ci est plus précieuse que tous les biens de ce monde. Pour le salut de nos âmes pécheresses, le Seigneur S'est laissé crucifier sur la Croix, par laquelle nous sommes sauvés et devant laquelle nous nous prosternons aujourd'hui.
Suivre le Christ signifie renoncer à soi-même, renoncer à tous ses caprices et lubies pécheresses, condamner son mode de vie agité et accomplir les commandements du Christ. Mais la vie actuelle est ainsi faite qu'aucun commandement du Seigneur n'a d'importance, et vouloir les accomplir devient réellement une croix très lourde à porter, car à chaque moment le monde se mettra en travers du chemin de celui qui veut suivre le Christ et tentera de le séduire par ses attraits pécheurs et toutes sortes de tentations.
Mais souviens-toi, chrétien, la vie terrestre ne t'est donnée qu'une seule fois. Elle ne sera pas répétée. Après, viendra l'éternité qui, elle, n'aura pas de fin. Et cette éternité correspondra en tout point à la manière dont tu auras vécu cette vie terrestre, ce bref tronçon de ton existence sur terre. Réfléchis bien à cela, et tout spécialement en ce jour où le Seigneur nous appelle à être des stavrophore-porteurs de croix, où chacun de nous doit prendre sa croix et la porter en marchant à Sa suite.
C'est là le devoir de chaque chrétien, de toute âme chrétienne. Ce n'est pas par hasard que l'on a mis sur nous une croix le jour de notre baptême. Ce n'est pas par hasard que lorsqu'un chrétien est inhumé, et afin qu'il repose jusqu'à la résurrection future, au-dessus de son corps est également plantée la Vivifiante Croix du Seigneur. Cela signifie qu'il était, ou du moins devait être, un stavrophore-porteur de croix.
Gardons cela toujours en mémoire et lorsque nous allons nous prosterner devant la Croix Vivifiante, prions le Seigneur qu'Il nous donne la force, la patience et la persévérance de porter jusqu'au bout la Croix de notre vie. Amen.
Saint Métropolite PHILARÈTE