Saints Évêques de Moscou

 

L’Église Orthodoxe Russe glorifie aujourd'hui ses grands hiérarques, les métropolites de Moscou Pierre, Alexis, Jonas, Philippe et le saint patriarche Hermogène qu'elle a agrégé plus tard au nombre de ses saints Primats. Chacun d'eux était un grand évêque, une règle de la foi, une image de la douceur et de la piété. Chacun d'eux était un grand ascète et une parure de l’Église Russe.

Mais ce qui est remarquable, c'est que leurs saints noms ne sont pas seulement inscrits dans les pages d'histoire de l’Église, mais également dans les pages de l'histoire de l’État Russe car, tout en étant à la tête de l’Église, ils ne pouvaient rester indifférents à la vie du pays, comment s'édifiait notre grande et sainte Russie, et ils participaient à ce développement de façon active.

Les temps étaient alors différents. Chaque Russe construisait tant sa vie personnelle que sociale en étroite dépendance avec la vie et les règles ecclésiales. La vie des Russes à l'époque de ces grands saints s'édifiait selon les fêtes et les normes de l’Église. Coopérant avec l’État, l’Église, évidemment, n'oubliait pas sa mission essentielle – le salut des âmes pour l'éternité. Apportant un éclairage de vérité évangélique, l’Église a toujours illuminé la vie nationale, indiquant ce qui est juste et ce qui ne l'est pas.

L'exemple de la vie des saints Alexis et Philippe de Moscou nous montre combien la voix indépendante et audacieuse de l’Église russe savait se faire entendre.

Lorsque le tsar Ivan le Terrible, homme intelligent, génial même peut-être, mais atteint de maladie mentale, se laissait emporter par la colère, ce qui lui arrivait fréquemment pour des raisons injustifiées, le métropolite Philippe ne craignait pas de lui faire grief publiquement, en pleine église, de ses crimes et forfaits. Mais ces réprimandes ne présentaient pas l'ombre d'une révolte contre le tsar. Le métropolite Philippe parlait en père spirituel et en loyal sujet du souverain. Si la nécessité s'était présentée, il serait parti mourir pour ce même tsar dont il dénonçait les agissements. Mais sa conscience de pasteur et d'évêque lui indiquait ce qu'il y avait lieu de dire, et il le disait. Comme il le fit un jour face au tsar pris de colère furieuse en lui disant : « Sur cette terre je suis un étranger, mais je lutte pour la vérité. Et aucune force au monde ne peut me contraindre à me taire ».

Nous savons comment, durant les tristes années de la révolution, les sans-Dieu qui s'étaient emparé du pouvoir en Russie avaient immédiatement déclaré la séparation de l’Église et de l’État comme un de leurs principes fondamentaux. Mais en Russie, depuis de nombreux siècles, l’Église s'était totalement unie au pouvoir de l’État, c'est pourquoi il eût fallu dire non pas « séparation de l’Église et de l’État », mais dire « l’Église est bannie, chassée de l’État ». Toutefois les sans-Dieu n'osèrent pas dire ainsi et dirent simplement que dorénavant l’Église serait séparée de l’État. Et ce fut le début d'un cauchemar qui dure à ce jour.

Mais en tout état de cause, ce qui nous a été légué par nos ancêtres des temps anciens et bénis, nous devons le garder précieusement et chacun doit comprendre que l’Église ne peut pas être séparée de l’État. Certes, elle ne peut pas se fondre en lui selon la parole du Seigneur « Mon Royaume n'est pas de ce monde », signifiant que l’Église et l’État sont de natures différentes, mais en même temps l’État ne peut vivre normalement que tant que l’Église irradie de vérité évangélique toute action du pouvoir civile.

Tous nous croyons que tôt ou tard le Seigneur prendra en pitié notre Patrie consumée de souffrance et de chagrin et que la foi et la justice y triompheront à nouveau et l’État pourra, comme par le passé, édifier sa vie en accord avec l'enseignement de l'Eglise.

Que le Seigneur, par les prières de nos grands hiérarques Pierre, Alexis, Jonas, Philippe et Hermogène, bénisse notre Patrie et la ramène sur la voie de la piété.

 

Saint Métropolite PHILARÈTE

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