SERMON de l’ANNONCIATION
et de la RESURRECTION de LAZARE
Annonciation : Vêpres : Exod. III, 1-8 ; Prov. VIII, 22-30 ; Genèse XVIII, 20-33
Matines : Luc, I, 39-49, 56
Liturgie : Hébr. II, 11;18 Luc, I, 24-38
Lazare : Liturgie : Hébr. : XII, 28-XIII, 8 ; Jn XI, 1-45
AU NOM DU PERE DU FILS ET DU SAINT ESPRIT !
Bien-aimés Frères et Sœurs,
L’Annonciation est le commencement de notre Salut ! ont dit avec justesse les Pères de l’Eglise. C’est une très grande fête de la Mère de Dieu, mais parmi les grandes célébrations mariales non dépourvues entre elles de similitudes liturgiques, la liturgie de l’Annonciation nous apporte des enseignements d’une particulière richesse.
I – Elle comporte, initialement, une prémonition théophanique d’une forte densité symbolique. Tiré de l’Exode, c’est l’épisode du Buisson ardent. Moïse voit dans la montagne déserte un Buisson qui brûlait sans se consumer. Surpris de ce phénomène, il s’approche et Dieu lui parle : «Déchausse-toi [ce qui veut dire que la terre de ce lieu est sacrée], Je suis le Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob …». De ce buisson ardent, Dieu s’adresse à lui. Ces paroles divines venues d’un buisson qui ne se consumait pas sont manifestations du Dieu-Parole, c’est-à-dire du Verbe, et nous savons, nous orthodoxes, que le buisson ardent est une icône de la Mère de Dieu qui porta en elle le Verbe de Dieu sans être consumée. Or Dieu dit à Moïse qu’Il a vu l’affliction des Hébreux sous les Egyptiens et qu’Il est résolu à les délivrer et à les conduire vers la Terre Promise.
C’est donc la grande libération historique des Hébreux, prélude à la libération des humains, opérée par le Libérateur qui naîtra selon la parole de l’ange du buisson non consumé, Marie la Vierge. Nous joindrons à cette annonce de joie, le passage de la Genèse lu à la Sixième Heure. Il s’agit de Sodome et Gomorrhe dont le scandale est monté jusqu’à l’Eternel qui envoie des anges – apparus au Chêne de Mambré. Or tandis que ceux-ci vont remplir leur mission, Abraham continue, avec une hardiesse dont il est confus, son dialogue avec l’Eternel … «Peut-être y a t-il dans ces villes perverties, cinquante justes … Les feras-Tu périr et ne feras-Tu pas grâce à cause d’eux». «Je ferai grâce, dit Dieu, pour ces cinquante justes !» - Et, poursuis Abraham, s’il ne s’en trouve que quarante-cinq ? – Je ferai grâce, dit Dieu pour ces quarante-cinq ! Le dialogue continue : «Et s’il n’y en a que quarante ?». Dieu fera grâce ! Abraham continue longuement … «Et s’il ne s’en trouve que dix ?» Le Seigneur fera grâce à cause de ces dix ! Même pour une poignée de justes !... Nous voyons par là l’infinie Miséricorde de Dieu, cette Miséricorde dont procède notre Salut dont nous célébrons l’annonce.
II – Avec la péricope de l’Epître aux Hébreux de l’apôtre Paul, nous sommes au cœur de l’avènement du Salut : «Celui qui sanctifie et ceux qui sont sanctifiés ne sont qu’un» : c’est pourquoi Il – c’est-à-dire le Christ – n’a pas honte de les appeler ses frères. C’est les enfants que Dieu Lui a donnés, et, puisque ces enfants sont chair et sang, il a Lui-même participé à leur nature, afin que, souverain sacrificateur semblable à tous ses frères – de la postérité d’Abraham que nous retrouvons ici – Il détruisît, par sa mort l’empire du diable et de la mort. Car Il n’a pas pris les anges, mais la descendance d’Abraham. C’est pourquoi il a fallu qu’Il fut semblable en toutes choses à Ses frères, afin qu’Il fût un souverain sacrificateur miséricordieux et fidèle –repensons à l’inlassable miséricorde du Dieu d’Abraham – et qu’Il remplisse pleinement l’expiation pour les péchés du peuple dont Il avait assumé la nature.
III – Rien, en effet, n’est impossible à Dieu. D’où l’association, dans les deux péricopes évangéliques, de la conception de la Stérile – c’est-à-dire Elisabeth, la mère du Précurseur – et de l’Incarnation du Verbe en Marie la Vierge.
L’évangile de Matines est celui de la Visitation : l’ange en effet dans son annonce à Marie avait explicitement mentionné l’attente inattendue d’Elisabeth et Marie lui rend aussitôt une longue visite. Elisabeth s’émerveille que la mère de son Seigneur la visite : Tu es bénie entre les femmes, dit-elle, et le fruit de ton sein est béni, et Marie répond : Mon âme magnifie le Seigneur et mon esprit se réjouit en Dieu mon Sauveur …
Auparavant, l’ange Gabriel avait paru devant Marie : Réjouis-toi, Marie pleine de grâces, le Seigneur est avec toi, tu es bénie entre les femmes, et avait annoncé qu’elle concevrait un fils auquel elle donnerait le nom de Jésus … Marie s’était étonnée «car elle ne connaît pas d’homme». L’ange lui dit que l’Esprit surviendra en elle, et, lui révélant que la stérile Elisabeth attend un enfant, il ajoute : «car rien n’est impossible à Dieu»
Christ S’est incarné du Saint-Esprit et de Marie la Vierge. Il a vécu parmi nous. Il a été crucifié et Il est ressuscité : par Sa mort, Il a vaincu la Mort. Rendons-Lui gloire ! et vénérons l’Annonciation faite à Marie, la toujours vierge.
IV – «Dieu est un feu brûlant», commence l’apôtre, dans cette péricope presque finale de l’Epître aux Hébreux, et il poursuit en évoquant toutes les vertus conseillées aux chrétiens, l’hospitalité – certains n’ont-ils pas reçu des anges, sans le savoir … – la visite des prisonniers, le mariage honorable, l’absence de toute avarice ; toutes les vertus personnelles, en somme : Dieu n’a-t-il pas dit : Je ne t’abandonnerai point.
Il faut se souvenir aussi de nos maîtres, ceux qui nous ont apporté la Parole de Dieu, imiter leur foi et leur vie. L’apôtre conclut ces avis par cette vérité de référence, absolue et qui est la base de tout : «Jésus-Christ est le même, hier, aujourd’hui et éternellement !».
Mémorable Préambule qui nous conduit à la Résurrection de Lazare.
V – Celle-ci est racontée par saint Jean dans toutes ses circonstances. Lazare était tombé – gravement – malade et ses sœurs, Marthe et Marie firent prévenir son ami, le Seigneur. Mais celui-ci ne se pressa pas de venir : cette maladie n’est pas la fin : elle est pour la gloire du Fils de Dieu … Le Seigneur, en l’occurrence, ne se désigne pas, ici, comme «Fils de l’Homme», comme il fait souvent. C’est en effet en tant que Dieu qu’Il ressuscitera Lazare. Il prend son temps, deux jours passent, et Il dit aux apôtres : «Lazare dort !». «S’il dort, c’est qu’il va mieux !», disent ceux-ci avec bon sens. Mais le Seigneur explicite : Lazare est mort et je me réjouis à cause de vous afin que vous croyiez ! Jésus a ressuscité d’autres morts, le fils de la veuve de Naïm, la fille de Jaÿr … mais jamais Il n’avait explicité cet objectif. Nous sommes vraiment dans une circonstance exceptionnelle – puisque nous arrivons à quelques jours de la Passion – et la résurrection de Lazare est elle-même singulièrement spectaculaire. Elle l’est d’autant plus que Lazare était mort depuis quatre jours : or chacun sait, dans les civilisations traditionnelles, que l’âme ne quitte le corps que le troisième jour – commencement de la corruption de la chair. L’apôtre poursuit, il modèle son récit sur la lenteur de son Divin Maître. Marthe, sachant que Jésus arrivait vient à sa rencontre et lui dit : «Si tu avais été ici, mon frère ne serait pas mort !». «Ton frère ressuscitera !» - «Au dernier Jour, je sais bien !», répond la pieuse Marthe. «Je suis la Résurrection et la Vie !» – autre révélation exceptionnelle dans cet épisode d’exception. «Quiconque croit en Moi – fût-il mort – vivra ! Crois-tu cela ?». Marthe acquiesce et elle poursuit : «Je crois que tu es le Christ, le Fils de Dieu, qui devait venir en ce monde !». Plénitude de la foi, de la confession explicite de Marthe …
L’épisode évangélique continue à se dérouler, lentement. Marthe fait avertir sa sœur, celle-ci quitte ses visiteurs – qui la suivent en pensant qu’elle va pleurer sur la tombe de son frère. Elle arrive. Le Seigneur n’a pas bougé du lieu où Il avait rencontré Marthe … Marie arrive, tombe aux pieds de Jésus en pleurant et redit à peu près les mêmes paroles que Marthe. Les autres Juifs qui l’avaient suivi, pleuraient aussi … Jésus frémit en Lui-même, Il demanda : «Où l’avez-vous mis ?» – Car homme, Il ne le savait pas –, et Lui aussi pleura si bien que les témoins disaient : «Voyez comme Il l’aimait» … On Le conduit au tombeau ; Il dit d’enlever la pierre qui fermait le sépulcre – «Seigneur, dit Marthe, il pue déjà …». Lazare était mort depuis quatre jours et la corruption de son corps avait commencé. Alors le Fils de Dieu adresse à Son Père une brève prière : «Je sais bien que Tu m’écoutes toujours, mais je te remercie à cause de ceux-ci».
Alors, en tant que Dieu, Il crie d’une vois forte : «Lazare, sors de là !» et Lazare, tout enveloppé de bandelettes – qui rendent tout mouvement impossible – sort du tombeau, le visage encore couvert du voile de face. Quelques jours plus tard, il participait à un repas chez lui avec ses amis et ses proches, en présence de Jésus.
La résurrection de Lazare MORT DEPUIS QUATRE JOURS est, peut-on penser, le sommet incontestable de tous les miracles accomplis par le Seigneur lors de Sa vie terrestre !
Que les prières de saint Lazare nous accompagnent en cette fin du Carême.
AMIN